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En France, le terme culture foot est souvent associé à l’Angleterre quand il s’agit de décrire le contexte footballistique et social de ce pays. Il est pourtant difficile d’en donner une définition spécifique, tant il regroupe plusieurs aspects culturels comme les clubs, les supporters, la société ou même la littérature. Il est temps de plonger dans cet univers, à travers le récit de ceux qui le vivent de l’intérieur.

“Ils vivent le foot de manière intensive. C’est une vraie obsession chez les Anglais. Le parcours sportif d’un club a vraiment un impact sur la dynamique d’une ville” résume Hamza Bencherif. Le défenseur central, capitaine de Guiseley (National League North/D6) aujourd’hui, ne peut pas s’y bien dire. Passé par Nottingham Forest, Lincoln City ou York, des villes où le foot est profondément ancré dans la culture sociale et populaire, il fait partie de ces joueurs dont la carrière a été mêlée de sport sur le terrain, mais aussi et surtout, d’un fanatisme prégnant autour des clubs auxquels il a appartenu : “À York, les fans étaient habités par le club. Malgré les descentes successives (York City est passé de la quatrième à la sixième division en l’espace de deux ans, entre 2015 et 2017), tu avais toujours du monde à Bootham Crescent, le stade de la ville. Tu sentais les fans au bord de la ligne de touche, ils chantaient constamment et mettaient la pression”. Une pression qui se traduit, dans certains cas, par une forme de violence verbale et physique. Récemment, malgré les bons résultats sportifs sur le terrain et une première place au classement de la National League North (D6), plusieurs joueurs ont été pris à partie à la sortie du stade. “Certains ont été agressés et insultés dans la rue après une défaite confie-t-il, les gens oublient vite que c’est difficile pour les joueurs de jouer dans un club historique, mais c’est la loi du foot”.

Ce fanatisme exacerbé est l’ADN des divisions inférieures anglaises. Peu importe la ville, la région, le stade, les supporters affluent pour encourager leur équipe de coeur. En Angleterre, pour ne pas permettre à la Premier League de vampiriser l’espace médiatique et footballistique, les rencontres du week-end de la League One (D3) à l’Isthmian League (D7) ne sont pas diffusées sur les grandes chaînes sportives du pays. L’objectif ? Faire venir du monde au stade et supporter son équipe locale.

Dans certaines villes, il arrive même que siègent plusieurs clubs professionnels et semi-professionnels. Ce particularisme pousse alors les habitants à supporter une seule équipe pour la vie. Un choix avant tout familial qui se transmet de génération en génération, des grands-parents aux petits-enfants. C’est d’ailleurs ce qui permet à toutes les tranches d’âge de venir au stade chaque week-end, en famille, peu importe la division dans laquelle le club supporté joue. Yannick Makiese a vécu ce phénomène de l’intérieur lorsqu’il évoluait à Arlesey, Merstham ou encore Staines, en sixième et septième division anglaise.

une identité footballistique ancrée

des chants aux envies insolites des fans

Cette mentalité d’encourager son équipe locale, coûte que coûte, beaucoup de joueurs français et francophones l’ont découvert, avec étonnement, en côtoyant les fans au quotidien. “En jouant pour Portsmouth, tu as l’impression d’appartenir à un club de Premier League confie Nigel Atangana, qui a évolué à Pompey (le surnom du club), entre 2014 et 2016. En France, si je devais comparer, c’est comme si tu jouais pour le Racing Club de Lens (Ligue 2). Il y avait toujours 18 000-20 000 personnes à domicile, alors que nous étions en quatrième division. Quand je me baladais dans la rue, les gens m’arrêtaient pour me demander un autographe ou une photo”.

Fan du club d’Arsenal depuis son plus jeune âge, Timothée Dieng ne tarit pas d’éloges quand il s’agit de vanter, avec flagornerie, les mérites du fanatisme et de cette culture foot. Mais comme d’autres joueurs avant lui, le défenseur central de Southend United (League One/D3) a été parfois surpris d’entendre à quel point les supporters sont viscéralement attachés à leur équipe locale.

Maxime Biamou, attaquant à Coventry (League One/D3) confirme : “Il y a un monde d’écart entre la mentalité du fan français et la mentalité du fan anglais. Quand tu arrives en Angleterre et que tu demandes à un fan quel est son club préféré, il y a de fortes probabilités pour qu’il ne te dise pas un club de Premier League en premier. Il peut te sortir un club de League One, de League Two, de Vanarama National League, d’Isthmian League.”

Toutefois, si les fans des clubs des divisions inférieures ne supportent pas forcément un club de première division, les supporters des clubs de Premier League eux, peuvent supporter, à l'inverse, un club des divisions inférieures anglaises. Très souvent, il arrive qu’en fonction du calendrier, certains fans assistent à des rencontres de sixième, septième ou huitième division quand leur équipe de cœur évolue à l’extérieur et non à domicile. À Londres, treize clubs professionnels : Arsenal, Barnet, Brentford, Charlton, Chelsea, Crystal Palace, Fulham, Leyton Orient, Millwall, Queens Park Rangers, Tottenham, West Ham et Wimbledon sont entourés d’une dizaine de clubs semi-professionnels. Si bien qu’un week-end sur deux, on retrouve très souvent des fans de ces clubs autour des terrains comme l’explique Stéphane Ngamvoulou (Maldon & Tiptree/D8) qui vit à proximité du quartier de Tottenham, non loin de l’antre des Hotspurs.

Une culture foot radicalement différente de celle qui peut être connue et louée sur notre territoire. Si les Anglais se prennent d’amour pour les divisions inférieures, c’est avant tout par passion et envie. Une marotte indéfectible. En France, à partir de la troisième division, il est rare de voir des stades remplis ou d’avoir des centaines de fans au bord du terrain. Rémy Clerima a évolué en région parisienne avant de rejoindre l’Angleterre en 2011. Au Blanc-Mesnil, le latéral droit n’a jamais connu d’ambiances enfiévrées, contrairement à ce qu’il a pu constater depuis son arrivée sur le sol anglais.

Maxime Biamou pousse plus loin l’analyse : “En France, quand les gens regardent un match en CFA (D4) ou CFA2 (D5), tu n’entends pas un bruit assène-t-il. En Angleterre, les fans chantent et hurlent. C’est un autre spectacle en fait. En France, le joueur rentre sur le terrain et repart aux vestiaires sans un bruit ou presque. Ici, tu entends les clameurs et tu ressens l’atmosphère. Pourquoi beaucoup de joueurs veulent venir ici ? Car tout est différent. En tant que footballeur, on cherche à jouer le plus haut possible, mais on joue aussi pour voir cette ferveur autour du football. Quand je rentre sur le terrain et que je vois ces gens crier autour de moi, je suis content et c’est pour ça que je veux jouer au football, même si je n’évolue pas en Premier League ou en Championship (D2).

En découvrant les stades bondés, les ambiances chaudes et le bruit assourdissant de certains stades, les frenchies ont rencontré, par la même occasion, des hommes et des femmes fanatiques, loin, très loin, de ce qu’ils avaient pu vivre lors de leur passage dans les divisions inférieures françaises. Après plusieurs bons matches à Torquay, Jean-Yves Koue Niaté, désormais à Aldershot (Vanarama National League/D5), a rapidement été adopté par les fans du club, qui, pour le récompenser de porter fièrement le maillot du club sur le terrain, ont décidé de lui créer un chant.

Thierry Audel a également eu la joie d’entendre son nom être scandé dans les gradins. Une forme de reconnaissance et de promiscuité que le défenseur central formé à l’AJ Auxerre, raconte fièrement.

Des chants, ou même, des envahissements de terrain. Zoumana Bakayogo est bien placé pour le savoir. Au bord de la relégation avec son club de Tranmere (League One/D3) en 2010, le défenseur âgé de 33 ans, a vécu des effusions de joie rares à l’issue d’une rencontre à couteaux tirés : “Je me souviendrais toujours de ce moment. On était en difficulté et dans la zone rouge toute la saison. On jouait notre dernier match à Stockport à côté de Manchester. On devait absolument gagner pour se sauver. Il y avait 4000 fans, alors que de l’autre côté, il devait y avoir 1200 personnes (rires), raconte-t-il. Ce match, on l’a gagné 4-1. Et à chaque fois qu'on marquait un but, des fans rentraient sur le terrain. Ils célébraient avec nous. Au coup de sifflet final, ils sont tous rentrés sur la pelouse et ont célébré avec nous. Les supporters ont cassé la barre transversale d’un but (rires). Ils sont restés avec tous les joueurs dans les vestiaires pendant je ne sais combien de temps... On ne pouvait même pas sortir ! Notre bus ne pouvait pas venir nous chercher car il y avait trop de monde (rires)”.

Cette joie se traduit aussi par des moments de rigolade pendant les rencontres. En Angleterre, les fans sont souvent considérés comme taquins et moqueurs quelle que soit la division. Les gardiens en sont les premières victimes. Yannick Makiese témoigne : “C’était lors d’un match contre Dulwich. Je jouais titulaire et j’avais donc des centaines de fans derrière mon but qui me déconcentraient. Mais en réalité, j’avais l’impression d’avoir affaire à des enfants. À un moment donné, un fan a commencé à me parler sérieusement : ‘Hey gardien, hey gardien, tes lacets sont défaits’. Moi je savais pertinemment que mes lacets n’étaient pas défaits. Je n’arrêtais pas de me dire : ‘Yannick ne regarde pas, Yannick ne regarde pas’. Le mec continuait à répéter sa phrase. Et discrètement, j’ai commencé à regarder si mes lacets étaient bien noués. Là, tous les fans ont commencé à crier : ‘Ah il a regardé, il a regardé !’ (rires). J’étais plié en deux”. Un jeu entre les fans et les joueurs qu’il résume affectueusement : “Les fans anglais, ce sont de grands enfants. Honnêtement, après avoir entendu ça, j’avais envie de me retourner vers eux et leur dire : ‘Les gars, vous êtes vraiment des gamins’ (rires)”.

Des enfants qui savent trouver le détail pour lancer un chant ou une moquerie. Nigel Atangana sait de quoi il parle. À 30 ans, le milieu d’Exeter City (League Two/D4) a souvent été la cible de ces facéties lors de rencontres de Football League ces dernières années : “Parfois, les fans adverses m’appellent Mo Farah, le célèbre athlète britannique du 5000 et 10 000 m. Ils me surnomment ainsi car je cours partout et qu’en plus, d’un point de vue physique, il y a des ressemblances (sourire). Comme lui, je porte une barbe et j’ai la boule à zéro”. En garde-t-il une rancoeur ténue ? Pas vraiment. “Les fans anglais sont des grands provocateurs, mais cela ne fait pas d’eux des méchants. Généralement, ce sont des blagues bien trouvées. Selon les histoires des uns et des autres, ils vont créer une chanson. Par exemple, s’ils voient un mec roux, bah forcément, ils vont chanter ‘ginger’ (roux en français) pendant tout le match (rires)”.

Excès en tous genres donc, et même demandes inaccoutumées pour d’autres. À Torquay (Vanarama National League/D5), Jean-Yves Koue Niaté en a vu de toutes les couleurs. “Il y avait une petite fille, fan du club, qui était amoureuse de moi. Elle passait par sa mère pour me demander si j’étais célibataire (rires). Elle m’avait même ramené des cadeaux à Noël ! Un vieux monsieur m’avait également demandé si je pouvais être son fils…” Plus à l’est, en banlieue de Londres, Maxime Biamou a été le témoin de gestes pour le moins déroutants lorsqu’il portait le maillot de Sutton, là encore en Vanarama National League.

Il ajoute : "À l’époque, on jouait les demi-finales des playoffs contre Notts County pour monter en League Two (D4). Avant le match retour, un fan était venu me voir : ‘Si on arrive en finale, que tu es élu homme du match et qu’on monte ensuite, je me tatoue ton nom sur le ventre’. Au final, comme j’avais été élu homme du match et qu’ensuite, l’équipe était montée, il était revenu me voir avec mon nom tatoué sur son ventre (rires). Dans le même style, une fan était venue me voir après un match pour signer un papier qu’elle m’avait tendu. Et derrière, elle avait demandé à un tatoueur de la ville de lui tatouer ma signature sur sa main (rires)”. Une anecdote également partagée par un ami-joueur de Mikael Mandron à Portsmouth.

En Angleterre, les fans ne sont pas les seuls à surprendre. Au sein même des clubs, anecdotes, vicissitudes et histoires bizarroïdes sont quotidiennement légion. Stéphane Ngamvoulou en a fait l’expérience il y a quelques années lors de son passage d’une saison à Hampton & Richmond Borough (National League South/D6) : “Un joueur assez connu dans le milieu du foot était arrivé au club, il s’appelle Marvin Morgan. Il possède une marque qui est très connue en Angleterre actuellement. À l’époque, le mec avait un gros caractère et une grande gueule, confie-t-il. Dans l’équipe, un joueur ne l’appréciait guère. Il se faisait pas mal chambrer par le mec en question. Les deux avaient même eu une altercation lors d’un match, ils en étaient pratiquement venus aux mains. Un jour, après un match, toute l’équipe était dans le bus. On commençait à se moquer gentiment du gars. Il a commencé à s’énerver : ‘Si vous continuez, je ramène une machette à l’entraînement’. Il faut savoir qu’à cette époque, il y avait beaucoup de crimes et de rixes dans certains quartiers de Londres, ça défilait pas mal dans les journaux, explique le milieu de terrain. Mais le gars avait l’air de dire ça sur le ton de la rigolade. On ne le croyait pas vraiment. Le lendemain, il était venu tous nous voir avant l’entraînement pour nous dire : ‘Les gars, j’ai la machette dans le coffre de ma voiture’. Certains joueurs lui avaient répondu qu’il n’allait rien faire avec. À la fin de l’entraînement, il avait invectivé Marvin Morgan : ‘Je t’attends, on va sur le parking’. Marvin ne le prenait pas du tout au sérieux (sourire). Et là, cet imbécile a sorti la machette de son coffre en disant à Marvin : ‘Tu vois, je t’avais dit que j’allais la ramener, maintenant, qu’est-ce que tu vas me faire ?’  Le fin mot de l'histoire ? “Les mecs ont été virés du club après leur altercation, mais l’affaire a fait grand bruit en Angleterre car Marvin Morgan était hyper connu. Sportivement, cela a eu des répercussions car derrière, on a enchaîné les mauvais résultats”.

Au nord de l’Angleterre, Hamza Bencherif n’est pas en reste quand il s’agit de raconter des anecdotes pour le moins improbables. “À York, mon entraîneur Gary Mills avait un rituel avant les matches à l’extérieur. Il nous emmenait toujours dans le même pub à Northampton. On jouait aux fléchettes, au billard, on écoutait de la musique, on mangeait des frites, des saucisses pour ceux qui pouvaient en manger et enfin, on pouvait boire. Le but était de nous réunir tous ensemble et passer de bons moments. Il voulait construire un esprit d’équipe”. Mais au fur et à mesure des années, le contrat de confiance entre Mills et ses joueurs n’a plus eu le même impact et s'est érodé selon le défenseur central d’origine algérienne : “Il a eu un problème avec la nouvelle génération. Contrairement à la nôtre, les jeunes étaient moins responsables. Ils passaient 3h au pub à se bourrer la gueule. Il avait parfois retrouvé des joueurs bourrés au petit matin. Et derrière, les mecs se plaignaient en disant qu’il était responsable de leur état physique…”  Alcool, bouffe, tabac, à Sutton, Maxime Biamou a rencontré un coach qui remplissait toutes les cases du bingo : “Après les matches, il nous payait un coup à boire et disait de nous amuser. Il me proposait tout le temps une bière ou un verre de vodka… C’était la foire (rires). Pendant le match, il fumait sa cigarette électronique. D’un côté, je me disais que c’était marrant, mais de l’autre, bonjour la réputation pour le club (rires)”.

Cette culture, différente, rassemble le peuple anglais autour d’un sport qu’il chérit jour après jour. Le foot et la culture ne sont pas deux termes antinomiques, mais bel et bien deux termes liés. S’insérer dans le football, c’est s’insérer dans la culture anglaise de l’intérieur et y connaître toutes ses facettes, parfois, avec surprise.

Infographie-affluencespng

"ici, ils supportent leur équipe locale avec ferveur"

"les supporters te motivent et te donnent un boost"

"les fans chantaient : oh niaté, tu es grand et fort"

"ils chantaient déjà mon

nom au bout de 2/3 matches"

"un fan a fait un livre sur

notre parcours en Fa Cup"

Timothée Dieng_culture foot
Rémy Clerima_culture foot_son
JY Koue Niate_culture foot
Thierry Audel_culture foot
Maxime Biamo_culture foot
headphones - Timothée Dieng
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headphones - Timothée Dieng copy (3)

“Quand tu demandes à un fan anglais quel est son club préféré, il y a de fortes probabilités pour qu’il ne te dise pas un club de Premier League en premier”

“Je n'arrêtais pas de me dire : Yannick ne regarde pas, Yannick ne regarde pas”

“Le coach avait un rituel, celui d'emmener ses joueurs dans un pub la veille d'un match à l'extérieur. Là-bas, on jouait, on mangeait, on buvait”

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